Où il est encore question du « burkini » et de l’affaire d’Arthez-de-Béarn mise en parallèle avec celle de Marseille, dans l’éditorial du journal Sud-Ouest de ce mercredi 10 août.
Tempête autour d’un burkini
« Après le voile, le hijab et le niqab, voilà, au cœur de l’été, le burkini – ce maillot de bain islamique – et son compère encore plus couvrant, le jiljeb de bain. Ces pièces de vêtement alimentent, depuis le début du mois d’août, une polémique qui a trouvé hier un épilogue provisoire avec la décision conjointe d’un parc aquatique privé des Bouches-du-Rhône et de la mairie des Pennes-Mirabeau de suspendre la sortie piscine proposée pour septembre par une association de femmes des quartiers nord de Marseille.
À première vue, cette initiative locale n’avait pas de quoi enflammer un pays. Organisée hors saison par un centre privé, la sortie n’était pas réservée aux femmes musulmanes, devait être encadrée par des maîtres-nageurs masculins, était ouverte aux garçonnets, et devait permettre l’accès aux loisirs aquatiques à des femmes qui ont rarement ou jamais l’occasion de se baigner.
Oui, mais voilà : les participantes étaient découragées de venir se baigner en bikini. Et même si le une-pièce assorti d’un paréo était accepté, cette restriction a rallumé le débat récurrent sur les exigences vestimentaires islamistes dans l’espace public et leur compatibilité ou non avec la laïcité.
Récemment, le maire d’Arthez-de-Béarn s’est trouvé confronté au problème de façon plus frontale, puisque des femmes ont prétendu se baigner en tenue islamique à la piscine publique. Agacé qu’une d’entre elles y ait été autorisée, l’édile béarnais a dénoncé un vide juridique. Sans doute suffisait-il, pour justifier une interdiction, d’invoquer l’hygiène publique comme on le fait pour proscrire le port du maillot-bermuda par les baigneurs masculins.
Mais, en plein climat post-attentats, l’affaire béarnaise et celle de Marseille réveillent la crainte de voir grignoter l’espace public par un « islamiquement correct » vécu comme une provocation par une bonne partie du pays. Plus que le burkini, ce qui est en cause est la revendication d’une ségrégation entre les hommes et les femmes qui, on le sait, est le credo – certains diront l’obsession – des islamistes.
« Couvrez ce sein que je ne saurais voir ! » On se souvient de l’exclamation de Tartuffe, l’hypocrite dévot secrètement émoustillé par la vue du corsage généreusement échancré de la servante Dorine. Relisons Molière. Car il y a de la tartufferie dans la pudibonderie affichée par les islamistes dès qu’il s’agit du corps des femmes.
Or, dans la République, leur liberté ainsi que l’égalité hommes-femmes ne sont pas négociables. »
Christophe Lucet, Sud-Ouest, mercredi 10 août.