« Il est prouvé par l’institut Pasteur que les lieux où l’on est contraint de retirer son masque sont plus dangereux que ceux où on le garde », avance-t-il. « Il n’y a pas de clusters avérés dans les salles de spectacle, les distances de sécurité étaient maintenues, les fauteuils désinfectés, la salle aérée. Toutes les mesures de sécurité sanitaire étaient prises. »
Revenant sur l’argumentation du premier ministre, qui justifiait la fermeture des lieux culturels par la nécessité de limiter au maximum les déplacements, Philippe Torreton pointe du doigt le « manque de sérieux » du gouvernement. « Comme pour le 11 mai, nous avons sonné le début de la récréation en supprimant les attestations. Les supprimer c’est dire à la population « faites ce que vous voulez », c’est contradictoire alors que l’on veut limiter les déplacements, et on n’a pas le droit d’être contradictoire dans des périodes tragiques. Soyons sérieux, on ne peut pas dire on n’ouvre pas les théâtres pour éviter les déplacements de la population et en même temps supprimer les attestations de déplacement. Le gouvernement n’est pas sérieux. »
> Un élément essentiel du vivre-ensemble
L’acteur, qui intervient dans des écoles pour animer des ateliers théâtre, regrette le manque d’écoute du gouvernement vis-à-vis du monde culturel, et le refus « de mettre en place d’autres possibilités d’action ». « Nous avons une formidable vitalité culturelle dont nous ne nous servons pas. Permettez-nous d’appliquer nos idées : il est encore temps d’être présents dans les Ehpad, les écoles et les prisons. Qu’est-ce qu’on attend pour mobiliser les acteurs du monde culturel ? Nous avons besoin d’autorisation, permettez que ça se fasse », réclame Philippe Torreton, qui met en cause la politique culturelle du gouvernement. « Ce qui bloque, c’est qu’il n’y a pas de pensée culturelle dans ce gouvernement », assure-t-il. « Une politique culturelle ce n’est pas seulement signer des chèques en fin de mois, c’est amener les gens au théâtre, c’est amener le théâtre dans des lieux où il n’a pas envie d’aller. »
Et l’artiste le revendique : la culture est, aujourd’hui plus que jamais, un élément essentiel du vivre-ensemble. « Nous n’avons pas le luxe de nous passer de la culture en ce moment » revendique-t-il. « On vit une époque terrible due au Covid, mais pas seulement. Un professeur s’est récemment fait décapiter en pleine rue. Nous avons besoin de la culture dans ces moments. » Pourtant, pour Philippe Torreton, le gouvernement n’a pas su se saisir du moment pour redonner au monde de la culture sa place dans la société. « C’est une opportunité ce virus, l’occasion d’un débat culturel énorme, or on baisse le rideau, c’est tout ce qu’on fait », regrette-t-il.
Marylou Maga, Public Sénat, 18/12/20