
Samuel Piquet a dénoncé cette parole désincarnée qui est le symptôme inquiétant d’un mal profond de notre société.
Samuel Piquet, journaliste à Marianne, était l’invité du Pingouin Alternatif, vendredi 13 mai, pour évoquer l’appauvrissement de la langue dans notre société et se demander si c’est « une maladie moderne ou le symptôme d’un mal plus profond ».
Il a surpris en ouvrant sa conférence par la lecture d’un discours qui a vite fait sourire ses auditeurs : en effet, ce texte était construit uniquement à partir d’un pot-pourri d’éléments de langage « mots pour la plupart creux et vides de sens que l’on retrouve dans le monde des médias, comme de la politique, de l’économie ou encore de l’école ». À ce sujet, Samuel Piquet sait de quoi il parle, puisqu’avant de s’orienter vers le journalisme il a exercé comme professeur de français pendant dix ans à Saint Denis.
Cette conférence passionnante fut émaillée de nombreux exemples tirés de paroles entendues dans les médias : consommateur (et non plus citoyen), dérapage, désescalade, rétropédalage, idées nauséabondes, nébuleuse, indiscrétion, décalé… L’article développé d’un journaliste, qui fait simplement son travail, devient « un décryptage ». Il faut « briser les tabous »…
Si ces termes, à force d’être employés, perdent leur force, ils changent parfois de sens : quand on demande au professeur d’être « bienveillant » dans son évaluation, on n’attend pas de lui qu’il soit exigeant en « voulant le bien » (sens du mot latin d’origine) de ses élèves, mais simplement « qu’il ne voie en eux que du positif ».
Samuel Piquet constate également que ces éléments de langage cachent un discours inquiétant : « faire preuve de pédagogie » signifie que les gens auxquels on parle ne sont pas capables de comprendre, on les infantilise.
> Une parole désincarnée
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